vendredi 30 mai 2008

Air France : la vérité qui dérange

Faisant écho au billet de Chondre sur Iberia, je me dois de révéler un fait peu connu : Air France affrète des vols expérimentaux sans informer ses passagers.
Mercredi 28 avril 2008, midi, Paris Charles de Gaulle, Vol Air France 2042, destination Genève. Embarquement à l’heure, tout semble normal. De gentilles hôtesses organisent l’embarquement, d’autres tout aussi gentilles accueillent le passager qui monte à bord, enfin certaines aident les nazes passagers les moins aguerris à s’installer à leur son siège. Suivent les annonces d’usage, des voix féminines, méliodieuses. Soudain, une voix : « Mesdames Messieurs, ici le commandant de bord, je vous souhaite la bienvenue à bord de cet avion, etc.., etc… » . Je sursaute. Quelque chose cloche quelque part, mais quoi ?
Quelques secondes me suffisent pour réaliser le problème : le commandant est une commandante. En d’autres termes, le pilote est une pilotesse. Le copilote aussi !!!! Oh my God ! Un avion entièrement géré par des femmes, pas un seul homme en vue !!! J'ai voulu sortir, mais il était trop tard, l'avion commençait à rouler. Ils avaient pensé à tout.
Bien sur, les hotesses font mine de rien, sourient, vaquent à leurs occupations, passent et repassent, certainement pour veiller à ce que personne ne panique. Je n’ose pas faire de scandale, en groupe les femmes peuvent être terribles. Je me dis que, grâce à Dieu, la compagnie n’a pas pris un énorme risque. Il n’y a que des loosers pour prendre un avion à midi pour aller à Genève ou alors quelques vieux schnocks, mais pas de personnage important, de capitaine d’industrie ou de vedette. Effectivement, l’avion est à moitié vide, ils sont futés, chez Air France.
J’ai bien vu que tout le monde faisait un effort pour se comporter normalement, en surface en tout cas. J'attendais le drame « Oh, c’est quoi le joli bouton, là ? Ouuups, la boulette ! », l’esclandre, le crêpage de chignons « Tu sais pas ce qu’elle m’a encore dit, la Valérie ? Puisque c’est comme ça, elle a qu’à le conduire elle-même son avion, je lâche tout, na ! ». S’il y a eu des incidents, ils ont été bien masqués, les quidams n’y ont vu que du feu. Ils sont très forts.
Nous sommes finalement arrivé à bon port, au soulagement général. Comme quoi, les prières, ça marche. Toutes ces dames étaient alignées pour saluer les passagers au débarquement, y compris la pilotesse avec ses galons "Au revoir, au revoir!" qu'elles disaient. J’ai bien remarqué leur air goguenard à toutes, mais je n’ai pas voulu leur faire le plaisir de les insulter, ces inconscientes écervelées. Je me suis contenté, perfide, d’un « Vous remercierez le pilote automatique de ma part ! ». Et toc, na!, que je leur ai dit comme ça, pan dans les gencives.

dimanche 25 mai 2008

Vroum

Jeudi, jour de grève, arrivée à Roissy au petit matin. Pour éviter les incertitudes du RER ou les embouteillages, j’ai pris une moto-taxi. Ce qu’il y a de bien, en moto-taxi, c’est qu’on est à peu près sûr de l’heure à laquelle on va arriver. On penche dans les virages comme au Bol d'Or, le vent siffle aux oreilles, la mécanique ronronne. Le grand moment, c’est quand on tombe sur un bel embouteillage. On dépasse tout ça comme des princes, slalom entre les pauvres voitures à l’arrêt, les genoux frôlent les rétroviseurs. Le pied !
Et puis quand on entre en ville, là, on voit qu’on inspire le respect. Les petites motos se recroquevillent de honte. On laisse loin dans notre sillage les voitures qui démarrent au feu vert. Une Honda Gold Wing, ça attire les regards des mecs qui glandent aux carrefours. Ils se sentent obligés de prendre l’air connaisseur, appréciant d'un regard en coin la mécanique, jaugeant la bête à l’arrêt avec des airs de gars rudes et sévèrement burnés. Total respect.

dimanche 18 mai 2008

Post-scriptum

C’était hier, le 17 mai, la journée mondiale de lutte contre l’homophobie.


Dessin de Pessin, Le Monde 18-19 mai 2008

samedi 17 mai 2008

La basilique de Saint Denis

Pour me rendre à la basilique, j’ai, tout benoîtement, pris la mythique Ligne 13 de la RATP. S’y pressait, comme à la grande époque médiévale, certainement, une foule de pèlerins, un peu plus bronzée que dans les livres, mais avec une très forte odeur de sainteté. Peu de cantiques accompagnèrent notre cahotant périple. A la station « Basilique de Saint-Denis », je m’attendais à sortir au beau milieu d’une grandiose esplanade, toute à la gloire du monument fameux. Pas du tout, pour rester dans un jus médiéval, on déboule dans de tortueuses petites rues piétonnes, fleurant bon le shawarma, bordées de boutiques vendant plus de vues de La Mecque que de Sainte Rose de Lima (pourtant souveraine contre l’acné). Enfin, au détour d’une rue sans prétention s’offre soudain au regard du visiteur ce joyau de l’art gothique. L’intérieur de l’édifice est séparé entre partie consacrée au culte (gratuite) et à la visite (payante, mais on n’est pas là tous les jours, alors ça va).
La quantité de tombaux royaux de toutes sortes est impressionnante : de simples dalles aux inscriptions à peines lisibles, à des monuments monumentaux (ben oui). La crypte ou reposent les restes (supposés) de Louis XVI et Marie-Antoinette au milieu d’une flopée de Bourbon de moindre calibre ne vaut pas leurs édifiantes statues agenouillées, en habite d’apparat (avec décolleté largement anachronique pour Madame, mais il faut dire que les portraits ont été faits vers 1830, donc pas tellement d’après nature). La faune qui se balade là vaut le détour. Au milieu de la nef, toute une ribambelle de gosses, probablement du coin car black à 90% répétait silencieusement une cérémonie, sans doute leur communion à venir. Un groupe de touristes distraits suivait un guide un peu suant qui lisait ses fiches. Assez bas-de-gamme le groupe (question bruyante de Gégé : « les vitraux, là, ils ont été démontés pour quoi exactement ? pour les restaurer ? » Non, pour les piétiner violemment, imbécile). Et puis tout un groupe exceptionnel d'adolescents fin-de-race. Un groupe de toute beauté ! Les filles maigrissimes (chaussures plates, socquettes blanches, jupe marine, queue de cheval – bandeau pour les vraiment salaces - sac en bandoulière, tête baissée mais l’air prêtes à hurler au viol), garçons non moins efflanqués l’air benêt à souhait, ricanants entre eux, col de chemise bleu pale ou blanche – mais unie - étalé sur pull marine, pantalon beigeasse et godillots. Je ne savais pas que ça existait encore. Le tout encadré par deux grands mecs costauds en blazer à tête de maîtres d’hotel, et une guidesse d’un age certain, en jupe sans fantaisie et aux manières péremptoires, munie d’un gros classeur plein de choses culturelles (« regardez les photos, mais le dernier qui l’a me le rend le classeur, hein ? »). J’ai, bien sûr, suivi ce groupe suranné, follement exotique. Un grand moment fut la visite de la crypte des Bourbons. Le groupe était agglutiné dans un coin, ils étaient seuls, en dehors de moi, à quelque distance, qui faisait semblant d’examiner un chapiteau des plus intéressants avec mon audiophone à l’oreille. On était entre soit, quoi. La dame patronnesse a décrit la façon dont les révolutionnaires ont exhumé les corps des rois et dont certains ont coupé le zob de je ne sais qui (c’est là que je me suis rapproché) et fait des cochoncetés avec les moustaches d’Henri IV. Une dame du peuple (ou plus exactement de la populace a cru bon de préciser la guidesse) a même utilisé les dites moustaches pour s’en parer le sexe (oh ! ah ! dans l’assemblée). On n’imagine pas, mais il y eu ici, nous a dit la dame, de véritables bacchanales ! (têtes baissées, mines contrites des filles et des blazers, et sourires en douce de quelques uns des dadais). Et la dame d’ajouter qu’il faut lire tous les textes, j’insiste sur tous (nous nous comprenons bien ?) pour comprendre ce qu’a été la Révolution.
Un moment de (vraie) grande beauté a été le chevet de Suger, chaque chapelle d’une grande et sobre élégance ornée de deux vitraux qui, dans quelque sens que l’on déambule font un mur presque continu de lumière. La lumière divine, comme le voulait Suger, a dit la dame, qui avait l’air de savoir de quoi elle parlait.
J’ai bien aimé la litanie de petites chapelles dont les noms, Saint Cucuphas*, Saint Pérégrin, Saint Maurice, Saint Osmane et Saint Firmin chantent aux oreilles du pèlerin. Car on y pélerinait ferme à Saint Denis à l’époque, il y avait des bousculades épiques, des gens étouffés par la foule, pour s’approcher des saintes reliques (de Saint Denis et de ses compagnons bien connus, Rustique et Eleuthère). Cette tradition s’est d’ailleurs perpétuée au Stade de France, tout proche, pour les pèlerinages à Bigard. Mais je m’égare. Retour par le tombeau grandiose de Louis XII et Anne de Bretagne représentés en bas nus, allongés, et – parait-il – avec une ouverture sur l’abdomen nécessaire à l’éviscération. Et en haut représentés agenouillés, vêtus de leurs plus beaux habits pour le jour de la Résurrection. François 1er et sa Reine (Claude) ont un tombeau sur le même principe de l’autre coté de la nef.
J’ai retrouvé mes dégénérés consanguins devant le tombeau de Dagobert, dont le nom a bien fait pouffer la jeune assistance. Pauvre France. Retour vers le métro en passant devant l’Hôtel de Ville: voitures enrubannées, youyous et musique arabe dans la mairie, c’est jour de mariage mon zami. J’ai cherché la pâtisserie fine du coin, pour goûter la fameuse spécialité pâtissière de Saint Denis qu’on achète certainement en famille en sortant de la messe. J’ai rien trouvé qu’un Quick. Pauvre France (re).
* D'après Wikipédia "Cucuphas" signifierait, en phénicien, "celui qui rigole". On se marrait déjà bien, à l'époque.

lundi 12 mai 2008

Bonjour Tristesse

Pas d'inquiétude, je vais très bien. Simplement, dans les rubriques « ouvrages balnéaires » et « les bouquins que tout le monde a déjà lu vingt fois, mais pas moi » nous présentons aujourd'hui : Bonjour Tristesse, de Françoise Sagan.
Paru en 1954, j’aurais quand même du avoir le temps de le lire. Eh bien, non, mais c’est maintenant chose faite. C’est l’histoire de l’été qu’une gamine de 17 ans passe avec son père (vieux beau de 40 ans. A l’époque on était vieux nettement plus tôt que de nos jours). Le père, viveur plein de fantaisie (aux yeux de sa fille), est tiraillé entre deux femmes : Elsa une créature peu futée (mais d’environ 25 ans) et Anne (aussi vieille que le père, imaginez la chose, mais d’une classe absolue). Le roman raconte comment la gamine va semer la zizanie entre tous ces personnages, en s’aidant de Cyril son amant de plage. Scandale à l’époque. Mauriac la surnomme « le charmant petit monstre ».
Contrairement à ce que je pensais, le roman a très bien vieilli. Il charme par l’ambiance de la Cote d’Azur des années 50, les petits soucis de la bourgeoisie parisienne en vacances (oui, j’ai entendu Arlette Laguiller ce matin à la radio), par la maturité mais aussi souvent la fraîcheur de la narratrice, mais surtout par la qualité de l’écriture. Quand on a pu écrire à 17 ans une phrase telle que « Sur ce sentiment inconnu dont l’ennui, la douceur, m’obsèdent, j’hésite à apposer le nom, le beau nom grave, de tristesse » on peut être satisfait de ne pas avoir totalement perdu son temps.
Coincidence, on annonce la sortie prochaine du film de Diane Kurys « Sagan » avec Arielle Dombasle (pas de panique, c’est pas elle qui jouera Sagan, c’est Sylvie Testud) et Pierre Palmade (ah bon?). Dans le désert cinématographique français, cette perspective m’emplit d’un sentiment connu sur lequel je n’hésite pas à apposer le nom, le beau nom chaleureux d’espoir.

samedi 10 mai 2008

La Bretagne, ce qu'il faut savoir

En Bretagne, il arrive qu’il pleuve. Je sais bien que les Bretons au téléphone disent toujours que le temps est radieux, que la météo nationale ne sait pas que le temps change tout le temps au bord de la mer, et que d’ailleurs les enfants se sont encore baignés hier. Mais il arrive qu’il pleuve. Je peux en témoigner : il a plu à peu près sans discontinuer les 8 et 9 mai 2008 dans la région de Concarneau (je sais, j’y étais). Dans le même temps, il a du faire assez bon à Paris puisqu’en arrivant aujourd’hui vers midi, le thermomètre indiquait 25 dans l’appartement (non chauffé, bien sur) et 29 dehors.

Sinon, en Bretagne, on lit Ouest-France, histoire de voir si les cons de voisins, les enfants, le proviseur du lycée, les copines, les alcooliques du bled, l’écureuil du jardin on est pas en photo dans le journal. Ouest-France doit avoir des centaines de milliers de correspondants qui mitraillent les rencontres sportives, les randonnées pédestres, les remises de médailles, les arrivées de nouveaux gendarmes, la retraite du gendarme, les départs en colonie, les retours de colonie, les anniversaires des centenaires, la plus grosse courgette de l’année, les concerts amateurs, les pièces de théâtre (idem), les soldes de langoustines, les vide-greniers, les concours de fléchettes et mille autres évènements sans intérêt. Grâce à cette couverture de chaque centimètre carré du biotope breton, chacun est à peu près sur de trouver chaque jour en photo quelqu’un de connu dans le journal. Ca peut-être soi même bien sur, mais aussi ses enfants, les gosses du con de voisin, la collègue qui a pris un coup de vieux, viens voir, viiiite !, le président irascible du comité de défense des connards alcooliques du voisinage (les braves gens qui veillent sur le sacro-saint sentier côtier, objet de toutes les convoitises parisiennes immobilières) ou bien un marin-pécheur alcoolique buriné qui va finir sur la paille à cause des bureaucrates parisiens, bruxellois, des syndicalistes alcooliques, des chinois, ou des japonais, (rayer la mention inutile).
En Bretagne, il y a aussi des touristes, même quand il pleut. C’est pas grave, ils ont prévu, ils sont équipés pour. Même les moutards en poussettes ont des bottes jaunes (comme tous les parisiens). Le touriste en Bretagne aime s’agréger en meutes très, très, très, compactes dans LA rue piétonne. On voit qu’on est entre fins connaisseurs de la Bretagne : tous les touristes font la tronche, quel que soit leur age, pour avoir l’air d’être du coin (la pluie, à la longue, ça ne fait plus rire tellement). Les rues piétonnes sont exactement les mêmes que celles qu’on a à la maison, puisqu’on y trouve de la faïence de Quimper, des glaces dégueulasses à la vanille avec plein de colorants différents à l’italienne, des sardines en boite, et des fringues Quiksilver, sauf que là quelqu’un a peint les volets en bleu marine. Ca change TOUT les volets peints en bleu marine. On est en vacances, ON PROFITE.

Bon, il faut être honnête, la Bretagne c’est aussi vachement joli (quand ça s’éclaircit, surtout), on fait des super joggings (viser entre deux averses et faire attention à ne pas trébucher sur des racines d’arbres humides), et on y mange plein de beurre et de lipides poly insaturés bien. D’ailleurs la découverte de cette fois-ci a été le homard aux frites ! Un demi-homard grillé, posé sur un tout petit peu de sauce à la crème légèrement épicée, et de belles assiettées de frites bien chaudes pour tremper dedans. Ma doué que c’était bon !!! L’adresse : Le Bistrot de L’Ecailler, au port de Kerdruc. Y aller de préférence entre octobre et avril, c’est à cette saison-là que c’est fermé, j’ai pas envie d’y retrouver des hordes de parisiens vraiment le mieux.