La
forêt de Montmorency est un lieu propice au jogging dominical. La bande est plus ou moins nombreuse selon les humeurs, les saisons et
le menu du déjeuner. La troupe athlétique suit toujours le même parcours, sauf ce dimanche où, (comme il y a 15 jours, mais si je rentre dans les détails je vais vous embrouiller) nous parcourûmes d’un trot léger l’inusité chemin de La Sainte Radegonde et nous esbaudîmes devant un endroit moussu en bord de chemin nommé La Fontaine de Sainte Radegonde. Belle occasion, me suis-je dis pour essayer d’en savoir plus sur la dame. Wikipédia nous donne une biographie assez fouillée (pour l’époque) de cette reine des Francs d’origine thuringienne, née vers 513 et qui fut une des 4 femmes de Clotaire 1er (les trois autres, comme
on s’en souvient, étant Chunsina, Ingud et la soeur d’Ingund, Aregund). Clotaire 1er, aussi connu sous le nom de Clotaire le Vieux était un des 4 fils de
Clovis, pour vous situer. Radegonde fut la captive de Clotaire dès l’âge de 5 ans (voir gravure ci-contre), et, malgré ses tentatives, elle ne réussit pas à échapper à celui-ci quand il se mit en tête de l’épouser vers 532 (il avait donc mijoté son coup pendant quatorze ans, ce chafouin de Clotaire). Son royal époux courait beaucoup le guilledou, malgré ses nombreuses épouses. Le jour où il massacra son frère, Radegonde (fille sympa mais faut quand même pas pousser) perdit patience, opta pour une vie monacale et créa, à Saix (ben oui,
Saix, dans la Vienne), un hospice pour secourir les malades. Clotaire, garçon quelque peu pusillanime, voulut récupérer la malheureuse. Radegonde s’enfuit en courant à travers un champ où de l’avoine venait d’être semée, et fit instantanément pousser l’avoine pour s’y cacher (épisode connu sous le nom de «
miracle des avoines »). Suite à quoi, Clotaire abandonna la partie et laissa son épouse créer le monastère Notre-Dame à Poitiers (plus connu de nos jours comme monastère Sainte Croix, suite à une relique, morceau de la vraie croix, donné par l’Empereur de Constantinople, Justin II, à Radegonde). On ne rigolait pas beaucoup dans cette abbaye, gérée par Radegonde et sa copine Agnès de Poitiers, qui fut, me dit-on la première abbesse de la première abbaye de femmes à être créée. L'abbaye devint un centre influent pour le maintien de la paix, grâce au rayonnement de celle qui fut, peu de temps après sa mort en 587, canonisée (Agnès, le fut aussi, normal). Elle fut enterrée dans l'église Sainte-Marie-hors-les-murs (aujourd'hui
Sainte-Radegonde) à Poitiers.
J’ai bien regardé la page
«saint fun facts» de Catholic Online, site bourré d’anecdotes absolument tordantes sur divers saints et saintes, et très joliment illustré, mais rien sur Sainte Radegonde. Elle a quand même été largement honorée autant sous le nom de Sainte Radegonde que Saint Radegund, puisque que
au moins 14 villages français,
5 paroisses anglaises et une
station de ski autrichienne lui sont dédiées. Elle est aussi la sainte patronne de
Jesus College à Cambridge, ce dont tout le monde ne peut pas se vanter parmi les
nombreux saints et saintes de l’histoire. Un bled allemand,
St Radegund bei Graz, semble représenter la sainte femme sous les traits d’une sorcière, ce que je trouve de très mauvais goût, même pour des protestants germaniques. Je n’ai pas pu trouver quels types d’interventions pouvaient être espérés de Sainte Radegonde, mais je m’interroge sur la position que l’église peut avoir sur ce genre de question, de toutes façons (si je trouve, je fais un post, promis).
Je n’ai pas trouvé de mention précise des miracles attribués à la sainte, même si l'eau de la fontaine de la forêt de Montmorency est censée guérir de la stérilité (c'est fou le nombre de fontaines situées dans des lieux buissonneux, près de sous-bois moussus et accueillants, qui guérissent de la stérilité). Un site la nomme comme
sainte patronne des cuisinières, mais il semble que
Saint Laurent et
Sainte Marthe tiennent la corde. Ce désordre de saints patrons est quand même infernal, il faut bien le dire
(appellez-moi le patron, ai-je envie de dire). Il y a des
saints patrons pour
des tas de métiers (Sainte Cécile de Rome pour les poètes, Saint Christophe pour les débardeurs (les débardeurs? alors ça, je savais pas), Saint Louis pour les passementiers (OK), Saint Raphael pour le renseignement (?), etc...). Mais aucun saint pour les sportifs. Scandale ! Je propose Sainte Radegonde comme sainte patronne des joggeurs (les VTTtistes n'avaient qu'à y penser avant, tant pis pour eux). Je vais me renseigner sur les formalités.
Attention tout de même, avant de vous emballer, il y a eu d’autres saintes nommées Radegonde. Il y a eu une sainte Radegonde ou Aragone qui fut martyrisée à Chaumont en Bassigny dans le département de la Haute-Marne, avec sainte Oliviera. « Les Huns d'Attila voulurent attenter à leur honneur. Elles préférèrent la mort » nous dit le site
Nominis qui semble assez pointu. Il y eut aussi la mystérieuse (et donc sans doute très envoûtante) Radegonde de Wellenberg dont on sait seulement qu’elle est décédée en 1330. Si vous avez des informations sur cette personne, n’hésitez pas, la page Wikipédia la concernant ne demande qu’à être alimentée.