samedi 20 janvier 2007

M'enfin ?

J’adore courir dans Paris au petit matin, avant qu’il ne fasse jour. La poésie du bitume scintillant de la rosée du matin, la place de la Concorde déserte, les avenues endormies, j’en parlerai une autre fois. Là, je voulais rapporter un incident qui m’a intrigué. L’autre jour, alors que je passais non loin de la caserne de pompiers à côté de saint Eustache, je me suis fait arrêter en pleine course par un jeune mec un peu éméché. A une heure aussi matinale (7 heures), je compatis avec les pauvres hères qui n’ont personne d’autre auprès de qui chercher assistance (les japonais, aussi, aiment bien arrêter les joggeurs en pleine course (j’en parlerai une autre fois)). Donc, ce jeune mec m’arrête avec des grands signes et me dit « hé M’sieur, vous êtes pompier ? ». Un peu interloqué, mais aussi trop flatté que l’on puisse prendre ma sobre tenue de jogging (bermuda noir, haut Quiksliver beige avec des bandes bleu marine sur les épaules qui font, c’est vrai, un tout petit poil militaire), je ne le démentis pas… Il bredouilla qu’il était lui-même pompier volontaire dans son bled et qu’il cherchait la rue du Louvre. Un jeune provincial perdu dans Paris, quel émoi ! Il titubait bien un peu, mais il était tout ce qu’il y a de lucide, j’insiste ! Il m’a vraiment pris pour un pompier, ouah, hé, la classe. De quelques gestes sobres de la main et avec une économie de mots toute militaire, je le mis sur le bon chemin. Je repris ma course gonflé à bloc, bombant encore plus le torse, le menton haut et mussolinien pour l’édification des quidams, bien peu nombreux à cette heure là il faut le dire, mais bon. Hors donc, je repasse dans le même coin ce matin, et je tombe sur un clodo en train de ranger son bordel de sacs plastiques sur le trottoir de la rue Montmartre. Un vrai gros clodo à la Franquin (m’enfin ! compris le clin d’œil ? faut tout leur expliquer), avec un bon gros tarin couleur framboise, une tignasse ébouriffée en feu d’artifice, d’énormes bajoues couvertes d’une barbe gris-blanc, la totale. Il m’a clairement vu arriver, toujours avec mon bermuda noir et mon haut Quiksilver que ça me donne l’air d’un pompier sportif. Je passe lentement à sa hauteur pour ne pas déranger son chantier. Surprise, à mon passage, le gars me fait sa plus belle révérence (un peu flageolante, mais quand même pas mal) et me gueule d’une voix de stentor imbibée à la grosse vinasse: « excusez moââââââââ, mais je préfère les dââââmes !! ». Comment font-ils pour avoir des voix pareilles ? J’ai eu à peine le temps de revenir de ma surprise pour lui lâcher « elles ont bien de la chance, les dames ! », je n’ai pas entendu la suite car ma course véloce m’avait déjà trop éloigné. Comment est-il possible que l’on me prenne, dans la même tenue, une fois pour un pompier viril et sportif qui fait son jogging matinal (good) et une autre fois pour Véronique-et-Davina qui gambadent en petites foulées (not so good)? Qui des deux imbibés avait le plus sûr coup d’œil ? Si quelqu’un a l’adresse d'un bon coach de relooking, ou de la fashion police, je suis preneur. Merci.

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