dimanche 29 novembre 2009

L'accoudoir

Après la bande de Gaza et le Cachemire, l’accoudoir des sièges de train et d’avion est un terrain de bataille des plus sensibles. Le premier arrivé considère que l’accoudoir lui appartient et le nouveau venu du siège à côté ferait bien de ne pas essayer de s’immiscer trop vite. Question d’espace vital, de gènes de conquérant du magdalénien. D’ailleurs, à moins d’être un goujat, le nouveau venu est forcément un peu gêné de perturber l’intimité de celui/celle qui est déjà installé(e) et s’assied en essayant de déranger le moins possible celui/celle qui a tous les droits puisqu’il (elle) ETAIT LA AVANT.
C’est ainsi que récemment, j’ai dû ruser pendant un bon moment pour essayer de profiter un peu d’un accoudoir sur un siège d’avion. Le Monsieur qui-était-là-le-premier avait son bras de conquérant posé bien à plat, tout le long de la fatidique séparation. Je n’avais pas bien vu à quoi, il ressemblait en m’installant, mais sa position disait assez que c’était un gars qui sait ce qu’il veut dans la vie. Connaissant les usages (nous étions en Business, que diable), j’ai commencé par mettre la pointe de mon coude tout au bout de ce qui restait, bien contre le siège. Tenant mon journal bien déployé, je me suis mis à tourner les pages négligemment en agitant les bras à chaque fois, pour enfoncer sournoisement le coude un petit peu plus loin à chaque page. Je sentais, comment dirais-je, une résistance muette, mais ferme de l’autre coté. Je n’avais pas bien vu à quoi ressemblait le voisin, mais au fur et à mesure que ma manœuvre s’éternisait me venaient des envies de meurtre contre ce gros porc, de tendance fascisante, alcoolique probablement, en tout cas inculte et grossier, car lisant l’Equipe. Pas moyen de lire mon journal tranquillement, il fallait prendre les choses en main. Plutôt que d’aggraver ma légère hypertension, je me suis décidé à attaquer, courtois mais ferme, et je me suis tourné vers lui en disant « Excusez moi, vous ne croyez pas que l’on pourrait le partager un peu, cet accoudoir ? ». Et là, magie des mots, tel la Bête embrassée par la Belle, le gros porc infect s’est mué en un gentil garçon avec un joli sourire tout blanc, juste un peu musculeux, mais c’est pas grave. Et c’est comme ça que j’ai gagné tout l’accoudoir pour moi tout seul, non mais des fois.

5 commentaires:

Patrick Cadour a dit…

J'adore! C'est aussi mon cauchemard en avion, du coup je demande un hublot et je me plaque contre "ma" paroi!

Léonie Canot a dit…

Ha, ha, ha ! Tenez-nous au courant si le CLEII (le "Comité des Lecteurs de l'Équipe Ignominieusement Insultés") porte plainte !!!!

sameplayer a dit…

@ Patrick: je fais de même, pour être tranquille au moins sur un côté et regarder les nuages.
@ Léonie Canot: vous pensez qu'ils savent vraiment lire?

Léonie Canot a dit…

!!!!!!!!!!!

Anonyme a dit…

Mêmes sensations à l'arrêt .Technid'un bus en essayant insidieusement de caser le bout de mes fesses entre un gros pépé plongé dans ses pensées et une ménagère rebondie.Technique:flexion du buste pour guétter l'arrivée événtuelle d'un bus qui n'arrive pas, rétablissement,c'estbon,ça recule et on recommence ;mais je n'ai pas eu droit au gratifiant sourire de mes voisins.Colette