mercredi 16 mai 2007

Le maître des âmes d’Irène Némirovsky

Après "Suite Française", qui m’avait ébloui, cet autre livre d'Irène Némirovsky qui, pourtant avait été un succès au moment de sa parution, m’a franchement déçu. Je n’y ai rien retrouvé de ce qui m’avait emballé dans Suite française.
L’histoire est celle d’un médecin immigré « levantin » qui crève la fin en France dans les années 1920 et qui fait fortune en prenant en charge les problèmes psychologiques de la bonne société. Le tout est raconté de façon sèche, corsetée, assez moralisatrice. Les ressorts psychologiques des uns et des autres, pourtant au centre de l'intrigue, sont assez pauvres, et des pans entiers de l’histoire sont réglés en un tournemain sans explication plausible. Le texte a été publié sous forme de feuilleton à l’époque, c’est peut être ce qui explique le coté plat de l’intrigue (pour ne pas perdre le lecteur d’une semaine sur l’autre ?).
La partie la plus intéressante du livre est, à mon avis, l’introduction. On y relève qu’Irène Némirovsky, elle-même russe et juive dans la France de l’entre-deux guerres, y utilise des termes et décrit des comportements qui n’ont pu que renforcer ses contemporains dans l’idée que des hordes d’immigrés « levantins » sortaient effectivement de leur fange orientale pour sucer le sang des bons français. On mélangeait sous le terme de levantin un peu de tout, des méditerranéens, des roumains, des russes, etc… tous plus ou moins suspectés d’être juifs. Etre juif était une tare, l’antisémitisme allait de soit et les auteurs à succès n’hésitaient pas à en rajouter sur le thème. Irène Némirovsky ne semble pas du tout s’élever contre ces idées. Illustration de la haine de soi de minorités qui acceptent pour elles-mêmes l’image que leur renvoient les autres ? L’histoire du « Maître des âmes », qui ne finit pas bien, confirme que, naturellement, les « métèques » sont condamnés par leurs origines à rester à l’écart de la société. Avec le recul il semble totalement grotesque que des esprits éclairés et même des personnes elles-mêmes caractérisables comme « métèques », aient pu prendre comme des évidences de pareilles sornettes.

Nous sommes dans une société où de pareilles âneries n’ont plus cours. Il y a bien eu une époque où l’on disait comme des évidences:
- il y a trop d’immigrés, ça se voit bien,
- les prisons soient des endroits violents et immondes, et alors ?
- une vie de labeur d’animateur télé, de patron du CAC 40 ou de footballeur doit être mille fois mieux rétribuée que la vie de labeur du type qui vide leurs poubelles,
- il est normal que les homosexuels ne puissent pas se marier ni adopter d'enfants, faut quand même pas exagérer.
Tout ça s'est dit à une époque. Mais c’est fini, nous avons bien évolué depuis.

Aucun commentaire: